lundi 14 janvier 2013

Mais pourquoi les montres ?



J’ai beau être lancé dans ma formation en horlogerie et y prendre un plaisir certain, je n’en continue pas moins de me poser plein de questions sur le sujet.
Pour agrandir ma collection privée de réponses de gens «qui savent», je m’en suis allé poser mes questions du moment à deux personnalités du monde horloger : Frédéric Jourdain, horloger indépendant réputé à mi-temps et formateur en horlogerie auprès de la CIP à Tramelan le reste de son temps, ainsi que Marianne Chappuis-Borgeaud, secrétaire du conseil de la Fondation Horlogère à Porrentruy.

Mes interrogations tournent autour des raisons qui ont poussé des zones géographiques spécifiques à devenir des «nids d’horlogers», de l’état actuel de l’horlogerie suisse, et surtout, de son avenir.
Après m’avoir dit qu’il était arrivé dans l’horlogerie par hasard avec un ami, parce qu’il fallait bien faire quelque chose (…) et parce que dans l’horlogerie, on gardait les mains propres et on finissait le vendredi après-midi, Frédéric Jourdain me précise tout de même que cette concentration, cette spécificité jurassienne, tient largement au principe de «l’horloger paysan», en ce sens qu’horlogerie et travail des champs étaient des activités complémentaires, et qu’au fil du temps, certains n’ont plus fait que de l’horlogerie. Dois-je comprendre qu’il n’y avait rien d’autre à faire?

A la question de savoir ce qu’est un «bon horloger», Frédéric Jourdain est clair : «patience et persévérance… et puis on y arrive, cela suffit». Voilà une réponse emprunte d’une grande modestie, pour un horloger grandement apprécié de ses élèves passés, réputé alentours, qui me confiait que si ce n’était une question de moyens, avec « tout ce qu’il a déjà fait », il y aurait de la matière pour créer son propre label! Pour lui, les sommets atteints en termes de prix et de «brillant » sur les montres, «c’est du vent». Selon lui, on utilise la réputation du monde horloger pour finir par mettre du ou plutôt des brillants sur des montres à quartz. Il est très critique en particulier sur l’idée d’acheter un mouvement à quartz à quinze francs pour se faire un énorme bénéfice ensuite, «ce n’est pas très juste». Pour autant, il estime que l’avenir du monde horloger réside bel et bien dans la qualité supérieure, sans laquelle nous finirions perdants. Le savoir-faire étant le plus important.

A la même question sur l’avenir du monde horloger, Marianne Chapuis-Borgeaud insiste elle-aussi sur le haut de gamme, seul à pouvoir «nous sauver». L’innovation, les choses qui sortent du lot, sont les éléments qui garantissent l’avenir. Par contre, elle ne trouve pas du tout incompatible le savoir-faire horloger et les sommets que nous évoquions plus haut. Ils participent à la réputation de notre horlogerie, et «alimentent la machine» aussi! Pour elle, l’inconnue lorsque l’on parle de l’avenir de l’horlogerie se situe surtout au niveau du label «swiss made», appelé à changer ; Ces changements à venir pourraient d’ailleurs permettre à l’horlogerie suisse de se développer encore selon elle, si les choses sont faites dans le bon sens.

A ce stade de la conversation, il m’est tout de même difficile de rester «neutre», puisque précisément, mon vœu le plus cher est de m’installer dans cet univers, dans quelque direction que mes pas finissent par me mener. A la question de savoir ce qu’il faut pour devenir un bon horloger, j’ai eu droit à un très beau consensus: patience et persévérance, ajoutés d’une dose de passion! Voilà qui a le mérite d’être clair; J’ai déjà eu de quoi exercer ma persévérance en cours, ma patience est plus limitée puisque je brûle d’en savoir tant et plus encore, mais la passion elle, ne fait que grandir! C’est assez simple, plus j’en sais et plus j’ai envie d’en apprendre! Cette passion justement, semble être tout simplement le dénominateur commun de tous ceux qui font marcher l’horlogerie, qui s’y impliquent, qui en sont les principaux acteurs ou plus modestement ne seraient qu’un rouage de ce petit monde! C’est également le moteur de la Fondation horlogère, dont les bénévoles sont tous mus par un besoin de sauvegarder le patrimoine horloger; Il faudra d’ailleurs que je vous en parle plus un jour, de cette fondation.

Cette passion se retrouve encore lorsque l’on aborde, un peu plus philosophiquement peut-être, la valeur que l’on accorde à une montre, à l’heure où l’heure justement, s’affiche un peu partout ailleurs que sur une montre: Pour Frédéric Jourdain, une montre, c’est de toute façon de l’émotion! Alors que tout le reste sombre dans la banalité, regarder l’heure sur une montre mécanique est primordial pour lui, pour autant que le mouvement soit apparent, car sinon, «on s’achète une quartz, qui n’a pas d’âme, hormis celle du ciseleur, si la montre est bien faite». Il faut que l’on puisse voir la technologie, que l’on voie ce «cœur de montre» qui fonctionne, que l’on voie ses réglages! En me parlant, l’émotion et la passion qui l’animent rien qu’en joignant le geste à la parole, en retournant son poignet dans ce mouvement finalement tout sauf banal, est plus que perceptible.

Je disais avant de commencer ma formation que je comptais «transformer la magie en savoir». Au-delà de cette formule clinquante, figurez-vous que plus j’en sais, et moins la magie ne s’efface! Non, tout au plus s’explique-t-elle un peu, mais elle subsiste; C’est décidé, quand je serai grand, je serai magicien… ou horloger, ce qui revient donc au même!

Bien-sûr, je ne pouvais faire l’économie de poser ma «question rituelle» à mes victimes du moment, celle de savoir pourquoi, mais pourquoi donc, les aiguilles des montres tournent… dans le sens des aiguilles d’une montre?
Pour Frédéric Jourdain, c’est un mystère total. Il évoque ceux qui ont bien réussi à les faire tourner à l’envers dans certains modèles, pour faire un  «buzz», mais concède ne pas avoir la plus petite idée de la raison pour laquelle elles tournent dans ce sens-là.
Marianne Chappuis-Borgeaud de son coté pense que cela pourrait avoir un rapport avec le sens de rotation de la Terre? Elle me dira finalement que c’est un peu comme «la poule et l’œuf». Quelque chose me dit que la vérité sur cette affaire va prendre des airs de recherche du Graal!

Il ne me reste donc plus qu’à méditer et appliquer les perles de sagesse de mes deux inspirateurs du jour, tout en retournant avec application et «micros» dans l’œil, à mon apprentissage, dont je continuerai de vous parler bientôt!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire